Les difficultés langagières des enfants dysphasiques

Comme nous l'avons précisé dans la partie "Définition : pour y voir plus clair sur la dysphasie", les difficultés de langage qui apparaissent chez les enfants dysphasiques sont très variables d'un enfant à l'autre: deux enfants dysphasiques de même âge pourront avoir des problèmes de langage très différents. De plus, chez un même enfant, les difficultés vont très souvent changer au cours du temps.

Dans cette partie, nous présentons les diverses difficultés langagières, classées dans chaque domaine du langage, qui peuvent être présentes chez l'enfant dysphasique.



Au niveau phonologique, c'est-à-dire au niveau des différents sons qui composent le langage parlé (p, b, ch, z, f...). Ne pas confondre avec les lettres de l'alphabet, les sons ou phonèmes représentent ce que l'on entend.

- L'enfant dysphasique va acquérir et maîtriser plus tardivement les différents sons de sa langue par rapport à un enfant sans trouble dysphasique : il a besoin de plus de temps pour créer son répertoire de sons.

- les sons les plus complexes, ceux qui sont acquis en dernier chez l'enfant non-dysphasique, restent difficiles à maîtriser pour l'enfant dysphasique.

- La différenciation de deux sons proches reste difficile pour le dysphasique. Il aura par exemple des difficultés à faire la différence entre un "PA" et un "BA" car les sons [p] et [b] sont relativement proches dans leur articulation. De même que les sons [s] et [z].

- Le langage de l'enfant dysphasique reste souvent difficile à comprendre pour une personne extérieure à l'entourage de l'enfant. C'est souvent les parents, les frères et soeurs ou encore la gardienne (nourrice) qui jouent parfois le rôle "d'interprète".

- La production des sons du langage de l'enfant dysphasique se caractérise également par son instabilité. Par exemple : pour produire le son [g] dans le mot "grenouille" l'enfant peut dire "drenouille" un jour puis "prenouille" le jour suivant.




Au niveau lexical, c'est à dire tout ce qui concerne le vocabulaire de l'enfant.

- L'acquisition des mots de la langue est plus difficile pour l'enfant dysphasique.

- Les premiers mots, qui apparaissent généralement autour d'un an, vont être retardés chez l'enfant dysphasique.

- Le nombre de mots qui constituent le vocabulaire de l'enfant dysphasique est donc moins grand que celui d'un enfant sans trouble et se compose principalement de noms, les verbes sont moins fréquents.

- On peut voir aussi chez l'enfant atteint de dysphasie des difficultés à accéder à un mot qu'il a stocké dans sa mémoire. L'enfant sait ce qu'il veut dire mais ne parvient pas à retrouver le mot qui lui permettra d'exprimer son idée.




Au niveau morphosyntaxique, soit tout ce qui concerne la capacité à assembler des mots pour faire des phrases et à comprendre les rapports entre ces mots (syntaxe), et tout ce qui concerne les marques d'accord des mots (morphologie) : en genre (masculin/féminin), en nombre (singulier/pluriel) et en temps (présent, imparfait, futur...).

En syntaxe, l'enfant dysphasique montre des habiletés plus tardives pour combiner ses premiers mots. Il reste donc au stade du "un mot" plus longtemps que l'enfant sans trouble. Les premières combinaisons de deux mots peuvent apparaître aux alentours de 37 mois chez l'enfant souffrant de dysphasie.

Une fois le stade du "deux mots" passé, les phrases produites par ces enfants ont tendance à être simples et plutôt courtes. On peut également remarquer que les phrases sont parfois incomplètes, qu'il manque un ou deux mots.

L'enfant a tendance à utiliser régulièrement la même structure de phrase. Il est difficile pour lui d'en changer.

En compréhension, l'enfant présente des difficultés lorsque les phrases sont plus complexes. C'est pour cette raison qu'il est vivement recommandé aux parents de s'adresser à l'enfant avec des phrases courtes et simples.

Au niveau de la morphologie, l'enfant éprouve des difficultés à former les mots à partir d'un autre mot que ce soit au niveau du genre (par exemple : indien -> indienne), ou du nombre (un cheval -> des chevaux). La principale difficulté pour l'enfant est de comprendre la relation qui existe entre ces deux mots, et donc d'assimiler la règle. Il intègre les mots "cheval" et "chevaux" séparément, sans parvenir à établir un lien.




An niveau discursif, soit ce qui se rapporte aux aptitudes de narration, à raconter des histoires.
L'enfant dysphasique éprouve des difficultés à situer le contexte de l'histoire en termes de lieu et de temps (lorsqu'il vous raconte sa journée il ne précisera pas forcément où ni à quel moment les événements ont eu lieu).
Aussi, il est difficile pour lui de respecter la chronologie d'une histoire : il a du mal à suivre et rapporter l'ordre des événements (début-milieu-fin).
Lorsqu'il raconte une histoire, l'enfant ne parvient pas à différencier et identifier les informations qui sont essentielles pour bien comprendre l'histoire des informations accessoires. Il a tendance à être peu informatif.




Au niveau pragmatique, c'est à dire tout ce qui concerne l'aspect social du langage et de la communication.
L'enfant dysphasique montre des difficultés à respecter les tours de parole dans la conversation. Ceci ne traduit pas un manque de politesse de sa part mais plutôt une difficulté à intégrer les règles qui conduisent la communication.
Aussi, on remarque que dans une conversation l'enfant ne tient pas toujours compte de son partenaire de communication et du contexte dans lequel se déroule l'échange. Il a du mal à adapter son discours en fonction de la personne à laquelle il s'adresse.
En raison de ses problèmes de langage, l'enfant dysphasique a tendance à moins engager la conversation, ce qui se répercute sur ses habiletés sociales.



Conclusions
Nous tenons à rappeler que votre enfant ne manifestera pas toutes ces difficultés à la fois. Il présentera des problèmes de langage plus ou moins marqués au niveau d'un ou deux domaines langagiers en particulier.

Cette rubrique a été conçue pour vous aider à mieux comprendre les difficultés auxquelles peut être confronté votre enfant. Nous pensons que c'est grâce à une meilleure compréhension des problèmes de leur enfant que les parents, qui sont les principaux partenaires de communication de l'enfant, pourront agir de manière adéquate et efficace.

Car nous tenons également à préciser que les parents jouent un rôle majeur dans la rééducation de l'enfant dysphasique. Leur collaboration avec la/le logopède est indispensable pour voir apparaître les progrès de l'enfant. C'est par un travail de stimulation quotidien (et pas uniquement quelques séances de logopédie par semaine) que l'enfant évoluera.